Johnny English, agent double zéro pointé, confronte Lorna, l’espionne à la moto rose, dans un bar à sushi. La scène est à mourir de rire. Mais ce n’est pas pour cela qu’elle nous intéresse.
La séquence
Johnny (Rowan Atkinson) se donne des airs, mais il n’a visiblement jamais mangé de sushi de sa vie. Sur le tapis roulant du bar à sushi, il saisit une assiette au hasard. Lorna (Natalie Imbruglia) lui fait le coup de la séduction. « Vous êtes courageux, vous. Pour moi, l’oursin, c’est le mets des connaisseurs par excellence. »
Johnny tente de poursuivre l’interrogatoire. Mais l’oursin résiste, refusant d’abord de se laisser attraper, agressant ensuite les papilles du héros. Lorna lui assène le coup de grâce : » Je crois que ce qui rebute les gens chez l’oursin, c’est qu’il se nourrit par le derrière. »
Elle s’éclipse. Johnny ne la suit pas, trop occupé à chercher une poubelle où recracher son oursin. Sa cravate se coince entre les lames du tapis tournant. Il est entraîné au milieu des assiettes, causant la déroute parmi les clients.
La lecture
La scène va bien au-delà du gag. En fait, elle reprend tous les classiques de James Bond, point par point.
La drague
Et le renversement des rôles, quand la méchante prend, si l’on ose dire, les choses en main. Une figure propre au 007 incarné par Pierce Brosnan. Il y a beaucoup de Sophie Marceau dans le personnage de Lorna.
Les allusions sexuelles
Ici, on taquine les baguettes, on discute de l’appareil reproducteur de l’oursin.
Le connaisseur
Dans les films, James Bond identifie sans peine un xérès de 1851, un caviar du Nord de la Baltique. Il est gourmet et un peu pédant.
Le vrai James Bond
Mais ce qui est encore plus rigolo, c’est que le « vrai » Johnny English, celui qui vomit les oursins et parle japonais comme une vache coréenne, est en fait assez proche du « vrai » James Bond. Celui des romans.
Celui qui, au Japon dans les pages d’On ne vit que deux fois, traite la culture japonaise par le mépris, descend le saké par barriques entières, trouve les baguettes fort malcommodes. Face à une langouste vivante et à un fugu, sans aller jusqu’à recracher son dîner, il avouera passer totalement à côté des subtilités de la cuisine nipponne.
Pour toucher aussi juste, il faut connaître son petit 007 illustré sur le bout des doigts. Et, ô surprise, les scénaristes de Johnny English s’appellent Neal Purvis et Robert Wade. À leur actif, ils ont co-écrit Le monde ne suffit pas (James Bond avec Pierce Brosnan), Meurs un autre jour (id.), Casino Royale et Quantum of Solace (007 avec Daniel Craig).
Un jour de saké sans doute, quelque part entre Pierce Brosnan et Daniel Craig, ils ont donné le jour à Johnny English…
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